Les graines trempées, l’acide phytique et les minéraux
Les céréales et graines complètes comportent énormément de minéraux et vitamines mais également de l’acide phytique qui bloque la disponibilité de certains micronutriments. L’acide phytique est une molécule végétale phosphorée, présente à l’état naturel notamment dans l’enveloppe de la graine, qui se lie par combinaison biochimique, appelée chélation, à des minéraux et oligo-éléments pour former des sels insolubles, les phytates. Ces phytates ont pour rôle de préserver une teneur suffisante en minéraux pour la croissance ultérieure de la plante.
On trouve de l’acide phytique dans l’enveloppe des graines, céréales et légumineuses comme le blé, le seigle, le riz, l’avoine, l’orge, le quinoa, le millet, le soja, les pois chiches, les lentilles, les haricots… ainsi que leurs dérivés. Cet acide est bénéfique pour la plante: il empêche une germination trop précoce et constitue une défense naturelle face à ses prédateurs.
Lors de la germination de la graine, une enzyme est activée, la phytase, qui détruit les phytates pour libérer les minéraux captifs destinés à la croissance de la plante.
Ainsi, en consommant des céréales complètes, des graines diverses et variées, nous ne pouvons absorber ce que nous apportent les aliments.
Au final, en plus de la mauvaise absorption des minéraux, nous pouvons aussi nous retrouver avec des maux de ventre, des ballonnements… surtout chez ceux d’entre nous qui ne sommes pas habitués à consommer des céréales et graines complètes.
Lors d’une consommation excessive, l’intoxication à l’acide phytique provoque de nombreuses carences, entraînant une acidose généralisée et surtout une importante déminéralisation.
Ce phénomène se rencontre souvent dans un régime alimentaire fondé essentiellement sur ces deux types d’aliments. Par exemple, une carence en calcium induit des troubles du rythme cardiaque et à long terme, des problèmes osseux comme l’ostéoporose.
Un déficit en magnésium, souvent associé à d’autres carences, participe aux troubles osseux et dentaires, au risque de diabète, provoque tremblements, crampes, spasmes, difficultés respiratoires, troubles cardiovasculaires, réactions allergiques, vertiges, migraines, anxiété, hyperémotivité, fatigue psychique et musculaire…
Une carence en fer aboutit à une anémie, avec extrême fatigue, pâleur, essoufflement, diminution des capacités physiques et intellectuelles et baisse des défenses immunitaires.
Un manque de zinc provoque un dysfonctionnement pancréatique, en particulier dans la synthèse de très nombreuses enzymes et protéines qui contiennent du zinc, jusqu’à des lésions organiques, aboutissant à un retard de digestion et d’assimilation du zinc alimentaire, auto-entretenant ainsi le déficit. Une carence chez l’enfant entraîne un retard de croissance, puis chez l’adulte, des troubles du goût et de l’odorat, des chutes de cheveux, des atteintes cutanées sévères, des troubles de la fertilité et une sensibilité accrue aux infections.
Enfin, une carence en cuivre est responsable de l’apparition d’ostéoporose et d’une anémie, laquelle est aggravée lorsqu’elle est accompagnée d’une carence en fer, souvent présente lorsque le cuivre, qui normalement facilite l’absorption du fer, fait défaut.
L’acide phytique, l’ennemi public numéro 1 des végétariens et végétaliens
Certaines croyances véhiculent encore l’idée qu’un mode de vie végétarien ou végétalien doit systématiquement associer céréales et légumineuses afin d’obtenir des protéines de bonne qualité. La théorie erronée des protéines végétales incomplètes perdure.
Cette idée est fallacieuse et dangereuse car, d’une part, les dernières études démontrent que les protéines végétales possèdent bien tous les acides aminés essentiels et qu’il n’est pas nécessaire d’associer céréales et légumineuses pour obtenir des protéines complètes, et, d’autre part, la présence d’acide phytique perturbe la digestion et le fonctionnement du pancréas dans la synthèse des protéines et des enzymes.
Ainsi, les végétariens et végétaliens établissant leur mode alimentaire sur cette association ne sont pas carencés en protéines par un défaut d’apport, bien au contraire, mais sont en réalité intoxiqués par les méfaits de l’acide phytique !
Alors, faut-il préférer les céréales et légumineuses raffinées ?
Certes, elles ne contiennent pas d’acide phytique, mais comme leur écorce est retirée, elles sont totalement dépourvues de minéraux et de vitamines. Par ailleurs, leur index glycémique est beaucoup trop élevé, provoquant des pics d’insuline, épuisant la fonction pancréatique et favorisant l’apparition du diabète.
En effet, l’écorce d’une céréale ou d’une légumineuse est tout de même importante car c’est une réserve en vitamines E, B1, B2, B5, B6, B9 et minéraux comme le magnésium, le sélénium, le zinc ou encore le fer.
Des solutions d’appoint
Une préparation spécifique des céréales et légumineuses complètes permet de neutraliser une partie de l’acide phytique.
Leur trempage dans une eau purifiée (éviter impérativement l’eau du robinet), légèrement citronnée, pendant quatre à douze heures selon le type de céréales ou légumineuses, permet de neutraliser une partie de l’acide phytique en activant le processus de germination. Il convient de jeter l’eau de trempage et de rincer plusieurs fois avant de procéder à une cuisson adaptée.
Il est à noter que les jeunes pousses, aussi appelées graines germées, peuvent se consommer crues et sont riches en vitamines, minéraux et antioxydants.
Cependant, l’acide phytique des légumineuses n’est réduit que de 58 % après trempage pendant douze heures puis cuisson. La réduction de l’acide phytique dans l’orge est de 84 % et de 58 % dans le seigle après trempage et germination.
Il est essentiel de respecter la préparation de ces aliments (trempage, cuisson, germination) en vue de neutraliser partiellement les anti-nutriments et améliorer leur digestibilité.
Et pour le pain complet et les pains aux céréales complètes ?
Les interrogations sont les mêmes. Sachez tout de même que la fermentation est également un moyen qui permet de neutraliser une bonne partie de l’acide phytique.
Dans le cas du pain aux céréales et du pain complet, il est possible d’optimiser l’absorption des nutriments en faisant lever le pain au levain, et non à la levure. En effet, le levain déclenche une fermentation lente faisant apparaître des phytases (les enzymes qui détruisent les phytates) et permet de baisser le pH, ce qui entraîne une diminution de la teneur en acide phytique. Mais sans cette fermentation « au levain », il vaut mieux se passer de pain complet.
Céréales et légumineuses, l’histoire de chaque civilisation
En analysant les autres aliments d’origine végétale et leurs effets sur la santé, on ouvre certaines pistes de réflexion sur l’alimentation originelle de l’être humain, avant l’apparition des premières maladies de civilisation. Au fil des millénaires, la sédentarisation des populations a troqué la cueillette et la chasse au profit de l’élevage et l’agriculture. Ainsi, toutes les grandes civilisations se sont bâties sur la domestication des céréales, faciles à cultiver et à conserver, moins soumises à la saisonnalité ainsi qu’aux aléas climatiques : en Asie, riz et soja, en Amérique latine, haricots rouges et maïs, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, riz et lentilles, ou encore blé et pois chiches. C’est en observant les vestiges humains datant de ces époques que l’on découvre pour quelles raisons les premiers signes d’intoxication et de déminéralisation sont apparus.
Par exemple, la carie dentaire est une maladie courante chez l’être humain, ce qui n’est pas le cas chez les autres mammifères, où son apparition témoigne en réalité d’une santé générale dégradée et de carences.
Les premiers signes de déminéralisation et d’acidification sont apparus au cours du Néolithique. Suite à la sédentarisation, le changement de régime alimentaire dû à la consommation des céréales et légumineuses a induit l’apparition des premières caries. En effet, les dentures humaines de cette période, mais appartenant à des populations vivant encore de la chasse et de la cueillette, ne présentaient pas la moindre carie.
Acide phytique, amidon, gluten, cyanure… Les céréales et légumineuses ne sont pas si saines
Outre l’acide phytique, d’autres éléments identifiés dans les céréales et légumineuses sont responsables de diverses pathologies: les amidons indigestes, le gluten ou d’autres anti-nutriments comme le soufre, le cyanure, les goitrogènes, les oxalates, les saponines, les lectines…
- La sclérose en plaques est plus fréquente chez les Anglo-Saxons et chez les Scandinaves qui sont de grands consommateurs de céréales.
- La plupart des migraines sont liées à la prise d’aliments contenant du blé et disparaissent avec l’arrêt de ces produits.
- Les dépressions nerveuses ont maintes fois été impliquées dans la consommation de blé.
- La maladie de Crohn est souvent mise en rémission par la nutrition artificielle. La réintroduction de certains aliments peut déclencher une rechute. Parmi les substances les plus redoutables figurent le blé et le maïs.
- Le déclin des civilisations précolombiennes a débuté à cause de la consommation exagérée de maïs. Il a été démontré que les Amérindiens sont passés, peu après l’arrivée des Européens, d’un régime alimentaire varié à une nourriture constituée à 90 % de maïs, avec son cortège d’affections : arthrose, caries dentaires et enfin, moindre résistance aux infections.
Le mot de la fin : une consommation raisonnable
Nous l’avons vu, les anti-nutriments des céréales et légumineuses sont difficilement neutralisables et sont responsables de dysfonctionnements qui peuvent être très préoccupants dans le cadre d’une alimentation exclusivement composée avec cette association.
Sans être intégriste, une légère consommation de céréales et de légumineuses, complètes plutôt que raffinées, est tout de même envisageable, à condition évidemment qu’elles soient bien préparées afin de limiter leur nocivité et apporter un minimum de nutriments biodisponibles.
En revanche, les anti-nutriments présents dans les fruits et les légumes ne sont pas préoccupants, car ils sont, quant à eux, très bien métabolisés et facilement éliminés par le foie et les reins. Le système digestif humain semble donc particulièrement bien adapté à ce type d’aliments, qui peuvent donc être consommés en très grande quantité.
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